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09/10/2019  |  Sport et Loisirs

TVA à 5,5% sur la réparation des vélos : « Une vraie opportunité »

©© Cyclable
Boris Wahl, PDG de Cyclable, un des plus grands réseaux de magasins de vélos en France, est revenu pour Filièresport sur ce que la réduction de la TVA à 5,5% sur les activités de réparation de vélo pourrait apporter à ce secteur.

Que représentent la réparation et l’entretien des vélos dans votre activité ?

Chez Cyclable, la facturation de main d’œuvre représente à peu près 3% du chiffre d’affaire. Ce faible chiffre est dû à la saturation des ateliers d’entretien. On a en moyenne trois semaines à un mois d’attente à partir du moment où on accepte un vélo en réparation. D’ailleurs, de plus en plus de magasins n’acceptent en réparation que les vélos qui ont été vendus chez eux.

Aujourd’hui, la réparation de vélo est un service où l’offre ne rencontre pas la demande. D’un côté, il y a des individus qui veulent se déplacer à vélo mais qui sont freinés dans leur démarche par le fait que leur vélo est indisponible des semaines dès qu’il doit être réparé car les ateliers sont surchargés. De l’autre côté, on a des candidats qui souhaitent travailler dans ce domaine, et des enseignes qui souhaitent créer des postes de techniciens cycles, qui souhaitent créer de l’emploi, mais qui ne peuvent pas être rentables. A l’heure actuelle, pour le devenir, il faudrait qu’elles facturent le service à un prix tel qu’aucun client ne serait prêt à le payer.

Dans le cadre du projet de loi de finances, un amendement a été déposé pour réduire la TVA sur les activités de réparation de vélo à 5,5%. Quels seraient les bénéfices de cette réduction de TVA pour les entreprises et les consommateurs ?

Si la TVA passe de 20% à 5,5%, on gagne près de 15% sur le prix. Pour les entreprises, cela permettrait de booster l’offre, de créer de l’emploi pour répondre à cette demande. En ce qui nous concerne, nous embaucherions, et nous ouvririons des points de services et des ateliers.

Pour le client, le service serait amélioré. En effet, le coût de la prestation serait inchangé car c’est ce que les consommateurs sont déjà prêts à payer aujourd’hui malgré des temps d’attentes de plusieurs semaines. On peut donc en déduire que les tarifs actuellement pratiqués sont les bons. Cependant, pour le même prix, le service deviendrait autrement plus qualitatif.  Les temps d’attentes seraient drastiquement réduits, et l’augmentation significative du nombre d’espaces dédiés à ce service leur permettrait de déposer leur vélo dans des dépôts à proximité de leur domicile.

Combien d’employés qualifiés avez-vous sur les activités de réparation ?

Un tiers de nos effectifs est spécialisé dans l’entretien et la réparation de vélos. Si la TVA diminue, nous pourrions créer des ateliers spécialisés dans l’entretien et la réparation de vélo et ainsi former et embaucher de nombreux techniciens.

Cette réduction peut-elle également encourager les Français à utiliser davantage le vélo pour se déplacer ?

Un des principaux arguments du vélo comme mode de déplacement est sa fiabilité. À l’inverse des transports en communs plus aléatoires, et des automobiles faisant face aux embouteillages et aux problèmes de stationnements, le déplacement à vélo est nettement moins sujet aux imprévus. Mais dès lors que les  services de maintenance sont déficients, cette fiabilité est remise en question et cela peut dissuader de se déplacer en vélo. Le problème actuel que le secteur connaît dans la réparation conforte les personnes qui ne souhaitent pas substituer leurs véhicules thermiques pour un vélo.

Projet de loi actuellement en discussion, attentes croissantes des consommateurs : l’économie circulaire est au centre du débat public. Pensez-vous qu’elle représente une contrainte, ou bien une opportunité pour votre secteur ?

C’est une vraie opportunité. Un technicien est au quotidien confronté au dilemme suivant : « Dois-je réparer ce composant ou le jeter et en racheter un nouveau ? » D’un point de vue écologique, c’est bien plus vertueux de réparer les choses, d’autant plus que nous avons la capacité et le savoir-faire suffisants pour le faire. Mais aujourd’hui, ce n’est pas rentable. Même si c’est absurde, il vaut mieux racheter une roue qui a été produite à l’autre bout du monde, et jeter des composants qui seront dans le meilleur des cas recyclés et dans le pire des cas – et c’est le plus fréquent – envoyés dans une décharge. On peut ajouter à cela le problème du bilan carbone de tous ces objets importés produits aux quatre coins du globe. Il faut donc encourager la réparation, et cela passe par la fiscalité, en l’occurrence avec un taux de TVA adapté. C’est un cercle vertueux.

D’ailleurs, la mesure relative à la réduction du taux de la TVA pour des activités de réparation de cycles a été soumise, sous forme de proposition de loi, à l’Assemblée Nationale. Le député Fabrice Brun (Ardèche, LR) a proposé d’inscrire cette mesure dans la loi afin d’inciter les consommateurs à réparer leurs vélos. Il argumente sa proposition en soulignant les bienfaits attendus parmi lesquels la création d’emplois et le développement d’un commerce de proximité. Ainsi, cette proposition participe de la volonté des pouvoirs publics à lutter contre le gaspillage.

Cette proposition de loi doit désormais être inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale pour être discutée. Si elle venait à être adoptée par les députés, alors elle sera transmise au Sénat pour examen également.

A noter que les députés Mathilde Panot (LFI) et Jean-Marc Zulesi avaient proposé un amendement similaire au projet de loi de finances 2020, amendement refusé par le Gouvernement.

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