Les Anglais consommateurs de la montagne française après le 29 mars?

Dur, mou, doux... On utilise ces dernières semaines quasi autant de qualificatifs pour imaginer le Brexit que pour distinguer la qualité de la neige fraîche tombée en abondance en stations. Brexit dur, plan B ou report de la sortie, quel type d'accord sur le retrait sera donc finalement entériné ? A l'image des communiqués de presse édités en janvier par Matignon comme par le Medef, l'économie française s'organise pour se préparer au pire.
Nombreux sont les secteurs préoccupés par les conséquences financières de ce divorce. A commencer par le tourisme et notamment la montagne française où 9% des journées skieurs sont vendues à des Britanniques (Chiffres DSF), pourcentage multiplié jusqu'à 4 ou 5 dans certaines stations ! « La Grande-Bretagne compte environ 1, 2 millions de skieurs et la France est numéro 1 avec 33,5 % de part de marché » indique Jean-Marc Silva, directeur général de France Montagnes. Une clientèle qui pourrait être refroidie, au moins dans en premier temps, si la ré-instauration des frontières était adoptée (Brexit dur) et le temps à la douane et les formalités de passage allongés.
Benoit Tavernier, sociétaire Intersport, à Morzine, Avoriaz, et aux Gets et propriétaire d’un chalet loué à une compagnie anglaise, est aux 1ères loges dans les montagnes françaises. « Nous sommes l’une des premières destinations des passagers des vols Londres / Genève. Il y a une très grosse communauté britannique, de clients et de résidants en partie à l’année. Ils sont pour la plupart contre le Brexit. Les règles de la sortie qui seront négociées constituent un enjeu énorme pour nous en station. Les anglais sont assez flegmatiques vous le savez. On les sent quand même moins insouciants ici sur le sujet. Je n’ai pas noté de signes de baisse de fréquentation, ni d’éléments factuels laissant à penser à un mouvement de panique. Je sens une confiance dans l’intelligence humaine. Pour autant, c’est assez exceptionnel de voir autant d’incertitudes si près de la date. Cela me fait penser au bug annoncé de l’an 2000. Wait & See » explique-t-il. « La saison 18/19 est assurée, note Martine Achard, en charge des marchés internationaux à France Montagne. Mais la saison prochaine se décide maintenant pour les tours opérateurs et à la sortie de Grand Ski, tout est encore flou. L'incertitude engendre des choix plus opportuns. »
TO & Catered Chalets, les habitudes anglaises
Spécificité britannique due notamment à l'insularité et à sa monnaie nationale, « 2/3 des skieurs britanniques réservent leur séjour en intermédiation donc via un tour opérateur » précise Jean-Marc Silva. Un point positif probablement pour ces touristes étrangers qui voient une organisation éventuellement plus complexe en partie prise en charge par leur TO.
En revanche, autre particularité, les Anglais se montrent friands d'offres « Catered Chalets » autrement dit des chalets avec services, « le personnel était sous contrat anglais avec des salaires attractifs par rapport au droit social français et cela ne sera plus possible en cas de Brexit ». Plusieurs options sont possibles suivant s’il y a accord de retrait ou pas. Les Irlandais et titulaires d’un passeport irlandais, donc citoyens européens, devraient être assez recherchés pour ces métiers de service.
Une adaptation de leur consommation vs un report de séjour
Quid du pouvoir d'achat de cette clientèle importante qui se retrouvera également face à une dévalorisation attendue de la Livre ? « Nous avons vécu ça déjà dans les années 2000, se souvient Jean-Marc Silva. La Livre avait perdu 20% mais les Anglais montrent une grande capacité d'adaptation dans leur consommation sans pour autant se priver de leur séjour en montagne. »
En attendant l'issue de ce Brexit annoncé, une campagne conséquente 100% digitale est menée en ce moment en Angleterre, tout comme en Belgique et Hollande, à destination des familles, Millenials et Dink (couple sans enfants). « Cette campagne menée avec Auvergne-Rhône Alpes, Atout France, Savoie Mont Blanc, Isère Tourisme et Easyjet s'élève à quasi 500 000€. » précise Jean-Marc Silva qui se veut confiant. « Les Britanniques aiment profondément notre destination. »