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06/12/2019  |  Union

Sport dans les quartiers : retour sur notre matinale

L’élaboration de politiques publiques spécifiques en direction des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) date du début des années 1980. Le sport a souvent été considéré comme un instrument pouvant apporter des réponses aux enjeux soulevés par la situation de ces territoires. C’est toujours le cas aujourd’hui où les pouvoirs publics s’appuient également sur une diversité d’acteurs pour tenter d’apporter des solutions en termes d’inclusion sociale. Les programmes proposés par l’USEP (Programme USEP-Famille, « Carte passerelle »…) ou par Play International (Programme Playdagogie sur deux axes : santé et vivre-ensemble, « Ecole Active »...) illustrent la diversité des actions mises en place. Véronique Moreira, présidente de l’USEP, et Hugo Beguerie, responsable du programme France de Play International, étaient les deux invités de notre matinale, le 26 novembre dernier.

USEP et Play International : deux modèles complémentaires d'intervention du sport dans les quartiers

USEP : inscrire l'engagement associatif dans les habitudes de jeunes issus des quartiers prioritaires

L’USEP est la fédération de sport scolaire des écoles maternelles et primaires. Elle est très présente dans les quartiers prioritaires. La Fédération compte des licenciés résidant dans ces quartiers dans 76 départements. Dans les quartiers prioritaires, 75% des élèves scolarisés en maternelle ou en primaire sont licenciés de l’USEP

Dans les quartiers prioritaires comme ailleurs sur le territoire, l’USEP entend remplir la fonction d’interface entre l’école, les collectivités territoriales et les clubs sportifs. Dispositif « Carte passerelle », rencontres « USEP – Famille »... La Fédération se donne pour mission de faciliter le passage entre l’éducation physique et sportive dans le cadre scolaire et la pratique au sein des clubs, et d'impliquer les parents dans la pratique de leurs enfants. 

Dans son activité, l’USEP est amenée à repenser la manière de pratiquer le sport, voire à imaginer de nouveaux sports. L’USEP modifie par exemple les règles de certains sports (Rugby touché…) pour les rendre plus inclusifs. La Fédération propose également des sports innovants (Kin-ball, Crosse canadienne…) pour éviter que les enfants soient influencés par la repsentation médiatique des sports diffusés à la télévision et jouent un rôle attendu. L’objectif est d’adapter la pratique aux enfants et non l’inverse. Par ailleurs, toutes les activités proposées par l’USEP sont mixtes.ré

Enfin, la Fédération s’inscrit également dans la dynamique olympique de Paris 2024. Elle prévoit de mettre en place un événement national couvrant la période 2020-2024 où seront organisées des rencontres sportives imaginées et conçues par les enfants.

Play International : grâce à la « Playdagogie », adapter les règles du sport pour en renforcer la vocation sociale

Play trouve son origine dans la création en 1999 de l’ONG « Sport sans frontières ». L’organisation avait été créée pour agir après des catastrophes (environnementales, conflits armés…) pour les enfants issus de ces territoires via le sport. Basé à Paris, le modèle traditionnel de fonctionnement de l’organisation était d’envoyer des éducateurs en mission sur le terrain à l’étranger pendant une ou plusieurs années. En 2012, l’organisation crée également une « Mission France », où elle déploie ses actions basées sur la pédagogie et le vivre-ensemble.

Le modèle d’intervention de Play repose sur la « Playdagogie ». Cette méthode consiste à introduire des messages de prévention dans la pratique sportive en adaptant les règles du jeu. Deux axes principaux : la santé et le vivre-ensemble. Après avoir expérimenté les nouvelles règles, un temps d’échange est organisé où le parallèle est fait avec la vie quotidienne. Play est en mesure de délivrer ce type de messages pour une grande diversité de sujets : l’égalité entre les femmes et les hommes, le handicap… Hugo Beguerie rappelle en effet que le sport n’est pas vertueux en tant que tel mais que ce sont les valeurs qui y sont attachées qui en font un outil et un vecteur de lien social. Ce modèle est soutenu par de nombreux acteurs tels que la Fondation FDJ ou La France s’engage. Grâce à ce programme, Play forme environ 1 000 intervenants par an.

Des solutions durables émergeront dès lors que l’action des différents acteurs sera coordonnée et partagée

L’engagement des pouvoirs publics demeure essentiel

L’engagement des pouvoirs publics est nécessaire pour que puissent être déployés les programmes développés par l’USEP et Play.

Play travaille en étroite collaboration avec de nombreuses communes, notamment Montreuil ou Roubaix (59). L’organisation construit avec ces collectivités des contenus spécifiques à leurs problématiques et en assure la mise en place et le suivi. Aujourd’hui, environ 70 000 enfants bénéficient des programmes pédagogiques qui sont développés.

Dans la même logique, l’USEP est partenaire des « Cités éducatives ». Il s’agit d’une initiative du Ministère en charge de la politique de la ville qui vise à faire travailler ensemble tous les acteurs d’un territoire. La collaboration et la coordination entre tous les acteurs apparaissent comme une nécessité pour agir efficacement. Ce dispositif doit permettre de renouveler le pilotage des interventions dans les quartiers prioritaires et de proposer de nouvelles activités.

L’Etat a notamment mis en place de nombreux programmes de rénovation urbaine. Pendant longtemps, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) s’est concentrée sur la rénovation du bâti. Désormais le sport fait partie des contrats de ville. Un changement de mentalité salutaire, car sans éducateur, sans encadrement, un équipement sportif a un effet social très limité.

Les entreprises et les clubs ont également un rôle structurant à jouer dans les quartiers prioritaires

Souvent, les passerelles sont très simples à construire entre les acteurs publics et privés. Ces collaborations peuvent être à l’origine d’un cercle vertueux pour le développement de la pratique ou la proposition de nouvelles activités.

Play a développé avec Nike, dans le cadre de son programme Global Community Impact, un projet « Ecole active » pour lutter contre la sédentarité, promouvoir la pratique sportive des filles. Nike s’engage ainsi à ne pas apposer de logo ou de signe marquant sur les équipements mis à disposition, l’école devant être neutre. L’organisation collabore également avec l’entreprise Hoops Factory (centres de basketball indoor) pour permettre l’accueil d’établissements scolaires ou d’associations. Dans la même logique, Le Five (centres de foot à 5) est allé à la rencontre des collectivités pour leur proposer de venir utiliser gratuitement leurs terrains lorsque ceux-ci ne sont pas occupés. Souvent, le frein principal, même au-delà du prix de la licence, est l’accessibilité des sites de pratique. Grâce à ce type de partenariats, des solutions peuvent être trouvées. Pourtant, malgré la bonne volonté des entreprises, la concrétisation de ces offres demeure une question politique et dépend de la volonté des communes d’aménager le temps scolaire par exemple. Il est intéressant de noter que les marques prennent de plus en plus des positions fortes, comme a pu le faire Nike aux Etats- Unis, parfois au détriment de leur intérêt économique direct.

La collaboration avec les entreprises n’est pour autant pas toujours si évidente. Depuis longtemps l’USEP souhaite travailler avec des entreprises, recherche des partenaires mais peine à trouver des acteurs privés qui accompagnent ses projets. C’est notamment le cas pour le « Petit Tour à Vélo » auquel participent environ 50 000 enfants par an.

Dans le même esprit que ce qui est fait pour l’Agence nationale du sport, le projet de loi de sport devrait comporter une forte dimension territoriale. Le « projet sportif territorial » pourrait être institutionnalisé. Cela permettrait à tous les acteurs de se rassembler (notamment les entreprises) et de travailler ensemble à l’élaboration et la mise en place d’actions.

Les entreprises doivent encore convaincre et lever les barrières parfois idéologiques pour être considérées comme de véritables partenaires, fiables, pour le développement de la pratique d’activités physiques et sportives.

 

 

 

Les entreprises peuvent également s’impliquer dans les quartiers prioritaires via des associations. Les acteurs privés sont au cœur des dispositifs proposés par Sport dans la Ville qui construit des centres sportifs et anime ces terrains pour accompagner les jeunes des quartiers prioritaires vers l’insertion professionnelle. Les entreprises sont réellement impliquées dans le projet de l’association, au-delà du soutien financier qu’elles apportent, elles impliquent également leurs collaborateurs.

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